Le Faux Rhum   

Bonjour messieurs dames, 

C'est une grande surprise que je m'exprime ainsi devant vous et je le conçois tout à fait. Malheureusement, je n'en ai pas le choix alors je vous présente toutes mes excuses. 

Je... 

Veuillez me pardonner. Je m'appelle Christèle Lacombe, veuve de feu monsieur Bertrand Lacombe, un illustre explorateur et bienfaiteur ayant consacré sa vie à aider les enfants unijambistes et malades et orphelins du nouveau continent à trouver une famille. 

C'était un grand homme ! Vous n'osez le dire car vous êtes modestes mais je sais que la charité vous concerne et que vous le connaissiez forcément. 

Il mourut d'une maladie en quatre jours seulement. Paix à son âme. Et voici qu'après sa mort je me débat moi-même contre la tuberculose !

Elle s'interrompt de nouveau pour tousser et cracher sur le sol. 

Mon docteur m'a dit que je ne survivrais pas au terme de ces deux semaines à venir, et je sens la maladie me pousser au bout du tunnel malgré la lutte. 

J'ai donc décidé d'honorer la mémoire de mon feu époux en offrant son héritage de 1 665 000 pièces, oui, j'ai bien dit 1 665 000 pièces, à des personnes charitables. 
Dans la crainte de trouver des personnes de bonne moralité qui puisse user de cet or à de bonnes fins, je vous choisis parmi ceux que Dieu a bien voulu mettre sur ma route et j'ai décidé de vous léguer cette fortune avec toute la modestie et la sincérité d'une donatrice. 
Je n'ai malheureusement pas eu d'enfant à qui offrir amour et finance.

Une nouvelle quinte de toux et elle déplie un mouchoir ensanglanté dans sa main. 

Ma famille m'a rejeté car je ne suis pas en assez bonne santé pour prendre le bateau et visiter mon cher paternel alité sur son lit de mort. 
Je vous invite à rester très discrets si vous êtes intéressés car des bandits me pourchassent. Ils en ont après ma fortune, hier déjà ils ont failli m'assassiner tout près d'une souillarde et Dieu merci j'ai feint la morte pour qu'ils s'en aillent ! 

Mon vœu le plus cher est de distribuer ma fortune aux âmes les plus charitables. Aussi, je vous invite tous à me faire parvenir - par l'intermédiaire disons de mon ministre Montalvès - quelques milliers de pièces afin de me prouver que vous êtes charitable, au nom de Cristèle Lacombe. Mon héritage est actuellement sur un navire du nouveau continent et à destination de Liberty, je suis donc actuellement sans le sou avec ma maladie. 

Nouvelle quinte de toux, puis une pause d'une bonne dizaine de secondes.

Ne vous en faites pas, vous serez entièrement remboursé. 
Et nul doute non plus que ceux qui feront preuve de la plus grande générosité envers une femme mourante seront ceux qui recevront le plus de ma fortune. 

Que la paix et la miséricorde de Dieu soit avec vous. 

Merci de ne pas chercher à me rencontrer en personne, je retourne à l'hôpital Santa Maria et vous ne me verrez certainement pas sur l'île à voyager ces prochains jours. 

Prend un air offensé, une main sur le cœur et l'autre devant la bouche. 

Qu'ouïs-je ? Ici une arnaque, et là le terme de manipuler ? Mon cœur ne peut supporter pareilles accusations mais je tiendrais bon, là, devant vous, car Dieu pardonne aux âmes qui s'égarent !

Je n'ose croire que l'on ose soupçonner une femme malade. Une quinte de toux chaque fois que ce mot survient. Observez bien mes yeux, là, cette brillance est bien réelle, et si vous continuez à m'insulter ce seront des larmes que vous verrez couler sur ma figure affectée. 

Que les marauds sceptiques s'écartent et laissent passer ces doux agneaux envoyés du Christ qui viennent prouver leur désir de s'enrichir en donnant. 

Ce disant, elle offre un élégant sourire vers Xantico puis elle se penche vers Elliott en lui tendant la main pour l'aider à se relever.

Dieu vous bénisse. Le paradis vous attend mais, avant cela, la richesse. Et que l'on cesse de briser mon corps qui n'est déjà que trop supplicié par tant de haine et de méfiance. Mon Dieu, que je souffre !
S'exclame-t-elle en penchant sa tête en arrière et en posant le dos de sa main sur son front.

Puis elle chuchote à Walter. 
J'espère que vous n'avez pas de parole, parce que si c'est toute une nation qui paye pour sa tranquillité alors vous aurez l'air fin, cher intendant. 

Qu'est-ce que c'est ça ? Nom de Dieu, on dirait de la viande. Il me tend de la viande. Il a un air bizarre sur la tête. Dans quoi je suis tombée ? Fais lui un sourire. Voilà. Un joli sourire qui laisse penser qu'il ne me laisse pas indifférente. Mais de quelle tribu est-ce qu'il vient, celui-là ? Probablement la même tribu que ce sale type au maquillage noir et blanc sur le visage.*

Du bout du gant, elle attrape le morceau de steak et le lève à hauteur de son visage. Son autre main trace un rond sur son estomac comme pour dire "mmh je vais me régaler". 

"Je.. euh.. Vous êtes fort aimable. C'est sûrement un présent d'une.. d'une très grande valeur, là d'où vous venez. Vous recevrez euh.. De la viande. De la très bonne viande. Avec de la sauce. Pour votre.. euh.. générosité."