Le Faux Rhum   

Après plusieurs jours de marche dans la jungle, je franchisai les buissons quand je suis tombée sur elle, ou plutôt sur eux. J'ai bien volontiers accepté de me reposer avec eux au coin du feu. Le type ne m'inspirait guère mais il semblait inoffensif... peut être un un peu dingue en y repensant.

Ce n'est que le lendemain que j'ai repris ma route. Quant à elle, elle repartait pour de nouvelles aventures et je ne pouvais que l'encourager à demeurer téméraire.

Je l'ai recroisé un jour par hasard dans une cabane, je pensais qu'elle y avait élu domicile, cela lui ressemblait bien. Je l'ai à peine revue depuis. Pourtant, j'ai vadrouillé. Le temple, combien de fois ai-je foulé ces pavés ? Et la ville, j'y suis retournée plusieurs fois, elle aurait dû s'y trouver.

Je n'avais pas vraiment fait attention au début mais avec les jours... les semaines... Puis, j'ai repensé à son histoire de temple, de cabane...

J'avais pour habitude de bien aimer tout savoir et de ne rien payer. Cela n'allait certainement pas changé. Mon nouveau compagnon était aguerri. Il pouvait m'aider à trouver n'importe quoi, n'importe … qui. Un petit morceau de papier pouvait tout changer.

D'abord, il y avait cet homme, je crois... un brin mystérieux. Je fus immédiatement avertie de son retour. Je le pisterai pour connaître ses intentions.

Et un jour, une nouvelle missive arriva. L'écriture n'était pas parfaite, les mots peu compréhensibles. Il fallait déchiffrer. De qui parlaient-ils ?

Elle ne se souvenait pas bien comment ça avait pu arriver. Bêtement surement. Comme tous les accidents. Elle était tombée dans cette crevasse et s’y était cassée la jambe. Elle avait eu mal, elle avait eu peur aussi. De mourir là, toute seule. Sans Tambouille, sans Alaïa, sans personne. Elle craignait aussi que quelqu’un ne s’en prenne à ses bestiaux, sans elle pour les protéger. Mais en trois jours, ils avaient réussi à se faufiler jusqu’à elle dans la crevasse. Allongée là, elle ne voyait que le ciel et les ramures des arbres au-dessus d’eux.

Elle eut alors un peu moins peur. La douleur la fatiguait et la fièvre commençait à s’installer. Elle avait des égratignures un peu partout, recouverte de terre et de poussière. Cendre ne se souvenait pas d’avoir souffert d’une quelconque faim. Elle ne mangeait pas vraiment correctement avant ça et la douleur lui occupait l’esprit à chaque instant où elle était éveillée.

Cendre ne se souvenait pas trop de grand chose. Quand elle ouvrait les yeux c’était parce que quelqu’un lui essuyait le front avec un linge humide, ou parce qu’on lui triturait la jambe et que la douleur la tirait d’un sommeil sans songe. Elle regrettait un peu d’avoir enfermé ses cauchemars dans une coffre... Ils lui auraient peut-être permis de rêver et de s’évader.

La jeune fille avait compris qu’elle avait été secourue par des Chikikiplumes. Pour elle le vrai miracle, si tant est qu’il y en ait eu un, n’était pas d’avoir été trouvée, sauvée et soignée mais bel et bien qu’aucun de ses petits bestiaux ne manque à l’appel.

L'homme me montra des vêtements et un dessin... celui d'une femme aux cheveux longs. Elle était morte. Les vêtements pourraient correspondre, je prenais mon épée en guise de mesure et j'assustais la lame aux longueurs du tissu complètement usé... je paniquais.

Mais le dessin me donnait un dernier espoir, elle... elle.. non ce n'est pas elle. Je voulais m'en convaincre mais cela n'était qu'un dessin, et si ...

Puis l'homme hésita et finalement il continua de parler, son doigt pointé vers le temple.

Elle s'est levée et elle a marché ???

 

 

 

 

"Jax Chiryacht : Dégages vieille peau!"

Voyant l'homme en train de faire une syncope au loin elle se marre.

 Umbrella :"hihi" 
"toujours aimable ici"

"Jax Chiryacht : veuillez vous barrer sans faire d'histoire ou je vous meule la gueule comme on dit"

Umbrella : "je ne fais que passer, ne soyez pas grognon"

Pauvre homme, il devait probablement la chercher également mais des coups de feu se mirent à retentir, il était temps de partir finalement...

"Tiens... Ça fait longtemps que j'ai pas croisé sa petite bouille à Ulüngen."

C'était pas tant qu'il s'inquiétait mais ça faisait un petit moment que Cendre avait disparu. La gamine les avait accoutumés à ses longues pérégrinations à travers l'île, semblant étonnement bien s'en sortir toute seule alors que franchement, si on avait demandé l'avis de Paulus, elle ne savait rien faire de ses dix doigts...

Mais bon ! Fallait croire qu'elle avait l'aventure dans le sang, la petite, et qu'une enfance à la dure sur une île des Caraïbes ne vous forgeait pas qu'un putain de mauvais caractère mais allait également avec quelques compétences de survie.

N'empêche, ça faisait un moment.

Et des fois il y pensait, comme ça. C'est à dire qu'avec une tripotée de petites sœurs qui lui cassaient les oreilles dès qu'il rentrait chez sa mère, le garçon était assez bien placé pour savoir qu'il n'aurait pas aimé en perdre une, même si putain qu'est-ce qu'elles étaient chiantes !!!

Alors quand il en avait parlé à Jax et Bougnette et que ces-derniers lui avaient assuré être sur la piste, ça l'avait un peu soulagé.

Puis le temps était devenu long encore. Puis il y avait eu ce poste de général - si on peut appeler cela ainsi en Hollande - et il avait été occupé. N'empêche. N'empêche.

Vu que ça commençait vaguement à le travailler quand il n'était pas occupé à tataner espagnols et français ou à repiquer les putains de fleurs du jardin du gouverneur pouvait pas embaucher un type à temps plein celui-là ?? le jeune homme se résolu finalement à déléguer le boulot à un professionnel.

Anthémis s'était échappée du Toymaker, lasse de voir les jumeaux De Windt s'interroger à tout bout de champ sur le destin d'une mioche qu'elle ne connaissait même pas ou presque. Au moment de partir, Simon l'avait retenue, lui demandant ce qu'elle comptait faire ; elle n'avait répondu que d'un haussement d'épaules, prétextant une course ordonnée par Gemini. En vérité, elle voulait simplement s'éloigner, rejoindre sa mère, peut-être…

D'accord. Fais bonne route. Peux-tu ouvrir l'œil sur le chemin, s'il te plaît ? avait signé Simon, inquiet, avant de décrire une fois de plus la gosse métisse qui s'était apparemment égarée. Ses signes étaient impeccables, maintenant.

Anthémis avait vaguement prêté attention à la description ainsi faite, répondant un d'accord qui manquait visiblement d'entrain. Debout derrière son frère, Effie avait froncé les sourcils, essuyant ses mains pleines de farine sur son tablier. Elle était rentrée épuisée du mariage qui avait eu lieu en grande pompe l'avant-veille, au bras de son père, toute fière. Cela avait instantanément énervé Anthémis, qui n'avait pas de temps à perdre dans des broutilles aussi futiles. Heureusement que les autres prenaient la relève, sa propre mère, notamment.

En sortant, elle avait pris la direction du repaire des Phénix. Torturer Paulus lui ferait sans doute le plus grand bien… Et peut-être qu'elle daignerait ouvrir l'œil. Pour Simon.